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mardi 30 novembre 2010

Vietnam : de l'aide au développement à la coopération économique ...

Je viens de passer 2 semaines en Asie du Sud-Est pour le suivi de divers projets de développement économique durable, dans le cadre des mes activités d'ONG.
Voici quelques réflexions provenant du terrain ... 




Sud Vietnam
Tout d’abord, je remercie bien sincèrement mon ami Ban, qui a bien voulu m’accompagner dans ce début de séjour au Vietnam. A peine monté dans l’avion à Zürich, nous avions déjà beaucoup de choses à nous dire, beaucoup d’idées à partager sur des sujets fort variés.
Notre voyage était avant tout programmé pour la visite de clôture d’un projet de coopération en faveur de l’école An-Binh, établissement privé de plus de 300 élèves, appartenant à (et dirigé par) une paroisse catholique établie dans le sud du Vietnam : financement de frais de scolarité et bourses d’études, complément de salaires pour les professeurs, équipement scolaire. On sait combien l’enseignement (libre) est une des clés pour l’avenir, là où des poches de pauvreté existent.

Le deuxième et dernier projet que nous visiterons ensemble est celui d’un bonze ayant l’intention de tirer parti des ressources naturelles environnantes (le bambou), pour développer un atelier de fabrication de différents types de produits, à partir de ce produit.
La particularité de ce projet est d’allier les dimensions sociale, économique et environnementale. Il pourrait donc entré dans une logique d’investissement de type capital-risque. Etude préliminaire à réaliser, pour confirmer.
Au départ, ce bonze a recueilli des personnes marginalisées, qu'il a logé dans des habitations construites à cette occasion. Une sorte d’Arche de Noé en pleine campagne. Parmi cette population d’une centaine d’individus, une partie pourrait facilement être réinsérée dans la vie active.
Logé dans une zone de plantations d’hévéas, au coeur de la région productrice de caoutchouc du Vietnam, l’impact environnemental de ce projet sera un volet à ne pas négliger.

Nord Vietnam
A l’issue de cette visite très excitante, nous nous sommes quittés, pour suivre chacun notre route.
Mon chemin se poursuit vers le Nord du Vietnam et sa capitale, Hanoï. Visite du bureau de la Coopération Luxembourgeoise, pour comprendre que la stratégie entre les 2 pays change un peu. J’en retiens que la politique de coopération passe progressivement d’une assistance au développement à celle d’un partenariat économique. C’est la conséquence logique dans le cadre d’un pays qui a largement dépassé le statut de pays en développement, pour faire partie de la prochaine génération des pays émergents.
Cela confirme mon sentiment que la logique du don – applicable au premier stade - s’efface progressivement au profit de la logique d’investissement. Notre conversation porte sur des considérations de développement de chaînes de valeur, dans des domaines tels que le secteur financier ou hôtelier.

Je serai confronté le lendemain avec des propos similaires, lors de ma rencontre avec la directrice du Microfinance and Community Development Institute (MACDI), organisme à caractère privé sous la tutelle d’un ministère. Nous évoquons ici l’idée de soutenir par du micro-crédit des agriculteurs à revenu moyen, afin de leur permettre d’adapter leur outil de production, pour fournir l’industrie agro-alimentaire locale (et se raccrocher ainsi à l’économie de marché).
Est-ce vraiment encore du micro-crédit ? Cela répond plus à une logique de micro-investissement. A explorer.

La dernière étape de mon séjour vietnamien sera la visite de suivi du projet de microfinance Chi-Em, en zone rurale pauvre. Beau projet mené par l'ONG française Entrepreneurs du Monde, dont la plus-value sociale est indéniable (et mesurable), car il intègre une part de services non-financiers centrale, sous la forme pratique de formations et d’assistance technique aux bénéficiaires de crédit.
Voici un exemple fort de microfinance « responsable », par opposition à la microfinance « business », dont l’Inde notamment fait la triste expérience en ce moment (nombreux cas de surendettement chez les bénéficiaires en raison d’une politique d’offre de crédits démesurée de la part de certains programmes). Eternelle question à propos du concept et des objectifs de la microfinance, à l’heure où de nombreux investisseurs occidentaux y voient l’opportunité de réconcilier performances financière et sociale.
La microfinance peut-elle générer un return financier compétitif par rapport à d’autres alternatives de placement, telles que des obligations d’Etat, par exemple ? Si oui, est-ce encore de la microfinance avec la fonction sociale qu’elle est censée apporter ? Je suis de plus en plus convaincu que la microfinance ne peut se passer de dons, si elle souhaite remplir pleinement son rôle social, car il est difficile de couvrir le coût des services non-financiers (notamment l’engagement de ressources compétentes pour l’assistance technique), sinon en rééquilibrant par le taux d’intérêt des crédits. Selon le contexte local, cela peut facilement relever parfois de l’usure … ce qui n’est pas le but !

Après 2 jours sur le terrain, j’abandonne Vanessa et Pascale sur place, aux mains de notre dévouée traductrice Huyen. La collaboration avec l’équipe locale est excellente, donc il n’y a pas de soucis. Notre schéma de partenariat mis en place sous la forme d’un Employee Volunteering Programme (EVP) avec une institution financière luxembourgeoise fonctionne bien. La contribution de Vanessa et Pascale est immédiatement appréciée.

Chine
Je clôture mon voyage par une petite échappée en Chine, dans le Yunnan, province frontalière avec le Vietnam. Province montagneuse et peuplée de minorités ethniques, dont certaines communes avec le Vietnam voisin. En fait, l’attrait principal de cette escapade est la visite de Shangri-La, ville frontalière avec la province du Tibet, installée à 3.200 m d’altitude. La population y est essentiellement d’origine tibétaine. Je remercie chaleureusement Ly, mon accompagnatrice durant ce parcours en territoire chinois. Nous visiterons notamment de nombreux monastères tibétains, bercés par l'odeur de l'encens et nous découvrirons la rudesse d’un environnement relativement isolé, dans un climat assez froid annonçant l’hiver.

lundi 1 novembre 2010

Quand aura lieu la dernière crise …

Seule une gouvernance mondiale pourrait apporter une solution.

Nous ne nous sommes pas encore dépêtré de la crise financière actuelle – manifestation la plus concrète d’une crise globale de la société – que de multiples experts se risquent déjà à pronostiquer les suivantes : crise des cartes de crédit en raison du surendettement des ménages, crise de la dette souveraine en raison de l’endettement excessif des Etats, crise du pétrole (que l’on pourrait qualifier plus généralement de crise énergétique) provoquée par l’inéluctable augmentation du prix du baril au fur et à mesure que la fin programmée des réserves va se préciser.
Et l’on oublie encore la crise écologique et humanitaire, cette bombe à retardement annoncée depuis déjà plusieurs décennies, mais qui – comme tout danger annoncé trop tôt et trop fréquemment sans ne s’être encore jamais produit – ne fait plus peur à personne. Dégradation des éco-systèmes entraînant d’un côté la désertification, de l’autre des inondations ou autres catastrophes naturelles. Sans ignorer les phénomènes plus insidieux tels que les répercussions sur la santé humaine, qui ont le défaut de se déclarer parfois jusqu’à une génération plus tard (dérèglements hormonaux, cancers, déficits immunitaires …). Ces risques-là sont infiniment plus importants que les crises dont on parle, qui ont l’avantage de n’être cantonnées qu’à la sphère économique dans son acceptation ordinaire (vie des entreprises et pouvoir d’achat des ménages). Ces crises ne sont somme toute que mineures. Elles ne remettent pas en cause la capacité de survie de l’espère humaine. Elles marquent l’évolution de tout système organisé, qui passe nécessairement par des étapes de crises pour se restructurer. Elles ne sont donc pas fondamentalement mauvaises puisqu’elles permettent de corriger les erreurs du passé et sont une réelle opportunité pour innover.

Seule la crise humanitaire mondiale est à craindre. Comme toutes nos crises actuelles, elle aura principalement ses racines dans le monde dit développé, mais à la différence des autres, elle sévira d’abord dans le monde dit non développé … c’est-à-dire là où la concentration humaine et la vulnérabilité des personnes est la plus élevée. Elle se propagera seulement ensuite dans le monde dit développé. Elle ne se manifestera pas par un krach boursier. Elle sera d’abord sociale et proviendra d’une émeute, d’une déclaration de guerre ou d’une catastrophe naturelle extraordinaire.
Ce ne sont donc pas les actuels « décideurs » du monde (G20) qui auront les moyens de la juguler. Si l’espèce humaine en sort indemne, cette crise sera définitivement le déclencheur d’une gouvernance mondiale.
Lisons un peu l’actualité entre les lignes : cette crise humanitaire est déjà belle et bien en marche.

mercredi 6 octobre 2010

A l’heure de la crise, quel nouveau relais de croissance pour les acteurs de l’économie sociale (associations, coopératives …) ?


Impact Financing, Venture Philanthropy, Employee Volunteering Programmes (voir exemple concret), …

Rappel de quelques concepts en vogue pour lever des fonds.







La pensée économique mise à l’épreuve
Il faudrait se passer de tout discours alarmiste, au sujet des impacts de la crise sur le secteur de l’économie sociale – même si celui-ci a directement souffert – car la période actuelle semble avoir suscité une réflexion chez les investisseurs fortunés, sur l’opportunité de placer une part (très marginale) de leurs avoirs dans ce secteur.

Il ne faudrait pas non plus s’imaginer que le monde va subitement changer, car les processus sont lents … mais ils sont là. Il semble ressortir de cette crise que la pensée occidentale, largement façonnée par la philosophie des Lumières, ne persévéra plus comme le modèle indiscutablement dominant sur la planète. Il est temps que d’autres courants de pensée viennent également ajouter leur contribution au développement de l’humanité toute entière.

L’économie de marché, telle qu’inspirée par le modèle occidental, n’est pas à jeter définitivement aux archives. Le principe de la concurrence entre acteurs, de la réalisation d’un profit ou encore le maintien de la propriété privée me semble important, ce qui ne veut pas dire qu’il ne soit pas nécessaire de procéder à quelques ajustements éventuels. Ces trois critères sont parmi les ingrédients qui garantissent l’initiative et l’émulation personnelle. Il faut seulement mettre les limites nécessaires, ou plutôt réorienter l’action individuelle vers une forme de prospérité sociale garantissant le bien commun.

Beaux jours pour l’économie sociale
Les voix s’élèvent dans les milieux économiques et politiques pour parler d’une réorientation de l’investissement vers les besoins de l’économie réelle. Un retour à plus de raison, ce qui signifie donc de façon indirecte à plus de valeurs.

C’est donc une aubaine pour l’économie sociale, qui par définition, se bat pour insuffler un vent d’humanisme dans les structures et modes de fonctionnement de nos sociétés. Ce monde de l’ombre se classe parmi les seuls acteurs en lien direct avec les populations et donc le marché sous sa forme la plus concrète, et ses réels besoins fondamentaux.

La période actuelle lui offre l’opportunité de se faire mieux connaître, notamment de défendre sa vision. Le secteur de l’économie sociale doit cependant accepter d’évoluer, sans craindre de perdre son identité. Aujourd’hui, beaucoup plus qu’hier, le monde économique est prêt à entendre des théories qu’il n’aurait jamais accepté de discuter il y a 3 ou 4 ans, tout simplement parce qu’il ne considérait pas le besoin de se remettre en cause, comme étant un élément déterminant. Les consommateurs ont largement eu l’occasion de s’exprimer par tous les moyens multimedia disponibles et les entreprises sont devenues plus réceptives.

En retour, le secteur de l’économie sociale devra globalement élever encore son niveau de professionnalisme plus élevé, afin d’accroître son impact. La bonne volonté et le bénévolat ne suffisent plus pour construire un monde plus juste. Il faudra continuer à véhiculer de l’émotion, mais en insufflant à la fois des méthodes de travail. J’ose croire en un modèle de firme hybride entre l’association ou la coopérative ouvrière et l’entreprise classique … c’est-à-dire une structure générant du profit pour ces actionnaires, mais œuvrant avec une vision long terme. Et nous savons qu’il n’y a pas de long terme sans patience et sans prise en considération de l’impact social et environnemental.

Aider l’investisseur à trouver le bon placement
N’est-ce pas justement ce qui a manqué durant la croissance économique d’avant cette dernière crise ? Quelque soit la période, l’épargnant est toujours là. On peut s’attendre à une réallocation non négligeable de fonds vers des produits à dimension plus responsable, que l’on range dans la catégorie de l’Impact Financing : des investissements abandonnant un peu de performance financière en échange d’une performance sociale mesurable. Une philosophie qui pourrait remplacer demain le traditionnel livret d’épargne. Des produits existent déjà : les fonds solidaires (OPC) ; le livret d’épargne solidaire de la BCEE/etika à Luxembourg ; certains placements de type private-equity.

Plus généralement, il existe une opportunité de partenariat, avec le secteur financier notamment, pour diriger des fonds vers des projets d’activités durables. Ces derniers devraient être gérés suivant le modèle de private equity : une association ou une coopérative se positionne comme apporteur de projets ; un ou des investisseurs institutionnels financent ; un suivi opérationnel et technique est assuré à faible coût au travers d’une base de bénévoles prêts à mettre à profit leurs compétences professionnelles au service d’une cause sociale (ce qui ne grève pas la rentabilité financière du projet). La population de bénévoles peut provenir soit d’une plate-forme de compétences externe, soit d’un appel à volontariat au sein d’une entreprise-sponsor.

Cette forme de sponsoring répond au concept d’Employee Volunteering Programme. S’il est bien gouverné, ce type de programme procure des bénéfices nombreux :

Tout d’abord sur le terrain,
1) il apporte en premier lieu des compétences dont l’entreprise-cible ne dispose pas nécessairement en interne

Ensuite chez le sponsor,
2) il contribue à renforcer l’identité interne et la culture d’entreprise (et donc la cohésion du personnel autour de valeurs communes
3) il est un vecteur idéal de communication et d’image vers l’extérieur. Qui pourrait s’indigner d’une entreprise encourageant ses employés à mettre bénévolement au service des autres leurs compétence professionnelles, dès l’instant que cela ne nuit pas à son activité ?
4) il diffuse de manière imperceptible parmi les bénévoles une autre manière de voir le monde, ce qui alimente le processus de changement de l’économie dans son ensemble

Enfin en dernier lieu,
5) la particularité d’un projet techniquement soutenu par une équipe de bénévoles d’un bon niveau de compétences peut entraîner un mouvement de sympathie, conduisant des investisseurs à vouloir s’engager.

Autre levier pour lever des fonds en faveur de l’économie sociale : la Venture Philanthropy. Celle-ci est inspirée par la nouvelle génération de philanthropes (façon Bill Gates), qui par curiosité, passion ou souci d’efficacité, souhaitent eux-mêmes s’impliquer dans la gestion du projet qu’ils soutiennent. La situation n’est pas toujours très facile à gérer, car au nom de son implication financière dans le projet, l’investisseur se donne le droit d’émettre des avis sur le fonctionnement. Il se sent d’autant plus à l’aise, que sa démarche est purement philanthropique. Le soutien ici est normalement du don pur et simple. D’une manière générale, le don ne doit pas être négligé dans le secteur de l’économie sociale, notamment dans les phases de démarrage d’activité. Il permet généralement soit de financer du matériel d‘exploitation, soit de couvrir les besoins de fonds de roulement.

L’économie sociale a l’avantage de la proximité. Il n’est pas nécessaire de voyager à l’autre bout de la planète, pour générer de l’impact social. En soutenant une activité locale, il est plus facile de se déplacer pour voir les résultats concrets de sa générosité.

"Tell a story ..."
Les possibilités de soutien de l’économie sociale sont donc variées. Il est essentiellement question de communication, afin d’une part de faire connaître les opportunités existantes dans ce domaine, mais peut-être encore plus … afin d’assurer la diffusion au plus grand nombre des résultats obtenus sur le terrain. Dans une phase d’incertitude telle que celle d’aujourd’hui, l’investisseur est demandeur d’émotion, de sens, d’affirmation de soi … bref, il recherche des valeurs inaltérables, dont l’économie « mainstream » a dû partiellement s’affranchir au fil du temps pour croître avec le moins possible d’obstacles devant elle.

Le sentiment d’humanité reste ontologique. Que le secteur de l’économie sociale exploite ce filon, sans faire de charité, mais au contraire dans une optique d’investisseur !

jeudi 30 septembre 2010

Der Frieden ist wieder unter Gefahr

Der Gefahr kommt nicht aus dem Krieg, aber aus der Nachlässigkeit gegenüber den anderen. Die Umweltverschlechterung ist ein gutes Beispiel ... Es fehlt noch ein Ethik des Friedens.

Der Missbrauch der Technologie (Atomkraft, Anwendung von Information Technologien bei Terroristen …) steht oft auf dem Spiel. Das ist aber nicht die erste Ursache. Die erste ist der Mensch selbst. Das Prinzip Verantwortung von Hans Jonas (eine „Ethik für die technologische Zivilisation“) ist nie so wichtig wie heute geworden. Die Nachlässigkeit bedroht unsere Zukunft.


Neben dem humanitären und Entwicklungs-Hilfe, übersehen wir einen Feld wo Nicht-Regierungsorganisationen ihre Zuständigkeit ergänzen sollten : die Bewahrung oder die Förderung einer Welt (i.e. eine Menschlichkeit) mit moralischen Werten.

Die heutigen inneren und Kooperations-Politk der Staaten fördern die Freundlichkeit zwischen der Menschen, aber kein Ethik der Zusammenarbeit zu Gunsten eines weltweiten Frieden. Ohne moralische Prinzipen geben es keine Perspektiven für eine Verstärkung der Beziehungen zwischen den Leuten.

Je mehr die Leute Werten verteilen, desto besser sind die Bedingungen für den Aufbau des Friedens zusammengestellt.

Frieden ist nicht das Ergebnis einer bestimmten Strategie, kein Taktik. Er ist nur die natürliche Folge aus einem geduldigen Jahren lang Prozess, in dem wir bemühen uns tiefer kennen zu lernen.

Mehrere freiwillige Initiativen zur Unterstützung der menschliche Link im privaten so wie im beruflichen Umfeld wären von hohem Beitrag in diesem wertvollen Prozess.

jeudi 23 septembre 2010

Restaurer en microfinance, les pratiques bancaires qui ont contribué hier au dynamisme local

Sur base de mes expériences du terrain, j’en arrive de plus en plus à la conclusion que rentabiliser la microfinance est un exercice extrêmment difficile. Il faut concevoir la microfinance comme une phase d’incubation. Une fois qu’elle devient rentable, ce n’est déjà presque plus de la microfinance, mais tout simplement de la finance conventionnelle (façon "street bank"). Cela ne me pose pas de problème particulier, si cette dernière garde l’esprit (son éthique originelle).

Ainsi, la microfinance ne devrait pas être conçue comme une finalité en soi, mais comme un vecteur de moralisation de la finance.

La microfinance apparaît comme la découverte des 30 dernières années, alors que ce n’est rien de plus que le phénomène de bancarisation que nous avons connu dans la 2ème moitié du 19ème siècle en Europe, avec la naissance des banques mutualistes. De la « bonne vieille » finance dans un esprit solidaire orientée vers la collecte de l’épargne et la distribution de crédits pour le financement d’activités de proximité et de projets d’intérêt général.

La communauté financière a tout simplement oublié quel est le métier de base d’une banque.

Global Depositary Receipts
Songeons au phénomène des Global Depositary Receipts (une spécialité de Citibank, semble-t'il), à savoir des certificats représentant des actions de sociétés des économies émergentes.

Le GDR est un instrument qui permet de contourner certains obstacles juridiques (pas de droit de vote, par ex., mais tous les autres droits sont normalement garantis). Dès lors que la juridiction devient plus ouverte et permet aux étrangers d’entrer directement dans le capital des sociétés, l’intérêt du GDR s’atténue. Il s’agit d’un instrument pensé pour être provisoire et non pour être pérenne. Il en va probablement de la microfinance : « une microfinance réussie est une microfinance qui a disparu … », me disait une connaissance du milieu financier.

De fait, la microfinance a une visée qui en quelque sorte la dépasse : le micro-entrepreneur doit ne pas rester à ce stade. S’il le demeure, c’est que l’économie qui l’entoure reste peu étoffée, manque de structure et/ou est affligé de conflits … ou bien qu’il n’a pas su faire prospérer son affaire.

Méthode du scoring
On peut néanmoins se féliciter des initiatives de l’UE, notamment au travers de la mise en place en 2009 d’un fonds de quelques 100 millions d’Euros., dédié à du micro-crédit.

Mais là encore, ce que l’on baptise microfinance est tout simplement du crédit, qui devrait être délivré par les banques traditionnelles … mais que plus aucune d’entre elles ne veut/ne peut accorder compte-tenu des systèmes de scoring (sur base d’une fiche signalétique Client, le système informatique définit un profil de risque et par conséquent la somme maximale de crédit que le client est en droit de recevoir). Il est très difficile pour un Private Banker de sortir du scoring, car il lui faut alors justifier l'écart.

Enfin, à noter que le scoring exclut une partie des conditions non financières du projet, des éléments intangibles (parcours professionnel du client , son réseau de relations …)

Avec la microfinance d’aujourd'hui, on réinvente tout simplement ce qu’était la banque d’hier.
Eternel recommencement ….

Follow the series :
- Beyond microfinance (1)
- Beyond microfinance (2)
- Beyond microfinance (4)

samedi 31 juillet 2010

Sortie de crise ? Essayons d'ouvrir les yeux ... !

On lit en ce moment un tas d'articles qui essayent tous de trouver la cause à la crise actuelle, soit par comparaison avec la Grande Crise, soit par analyse historique des courbes de taux, et par voie de conséquence des niveaux d'endettement ou d'épargne en Chine, aux US et ailleurs, ou encore par prise en considération du cours des devises telles que le Yuan, le $, etc ...
Je me suis même étonné de lire des analyses qui me semblaient contradictoires, me conduisant à la conclusion que dans le monde complexe actuel, il est difficile de retracer le fil des causes. Cela est mon sens peine perdu. Il y a toutefois un fait majeur à relever, à la lecture de tels articles : on est en pleine déculpabilisation : "c'est la faute aux taux d'intérêts" ... ou "à la faiblesse du Yuan", voilà ce que retient le commun des mortels.

Tous ces économistes raisonnent encore en terme de croissance et nos politiciens se battent pour savoir de qui entre Obama et Merckel a raison sur la politique économique à tenir (relance de la consommation vs. restrictions budgétaires). On est encore dans un débat d'immédiat après-guerre, à une période où l'on n'avait pas pris conscience de la finitude du monde physique (ses ressources naturelles, etc ...). C'est ce type de discours qui m'effraye vraiment.

Si aujourd'hui, il devient possible de traiter à grande échelle de concepts autrefois difficilement remis en cause, tels que : "qu'est-ce que la prospérité ?" ou « le bonheur », c'est encore largement (pour ne pas dire complètement) avec une grille de lecture, un mindset qui n'a pas changé : mon confort personnel avant de commencer à m'intéresser au sort des autres.

Je ne vois pas encore se dessiner un courant de pensée profond qui porterait sur des considérations telles que : la juste valeur du travail (par opposition au capital) ; la notion de temps (par opposition à l’instantané, l’éphémère, le superficiel) ; la notion de responsabilité / d'engagement (par opposition à l'actuelle "myopie du désastre").

Il serait presque difficile d'avoir un regard optimiste sur l'avenir ...
Est-il possible de rattraper la situation, ou le temps ne nous laissera t'il pas cette chance ? Y-a t'il à ce point urgence ? Je n'en n'ai pas idée ... Un changement des mentalités prendra au moins une génération, sans compter celle de nos enfants respectifs. Le changement doit déjà être introduit à la base, i.e. dans le système scolaire (entre autre), ce qui supposerait de changer la politique de nos « Education Nationale » ... Même en commençant dès maintenant, je ne suis pas sûr que les enfants de nos enfants en profiteraient (il faudrait bien plus que 15 ans pour rebâtir un programme scolaire sur des concepts nouveaux dans le domaine de l’histoire et la géographie, de l’éducation civique, des sciences économiques, etc ...).

Comme me disait un ami : « Il faut de toute évidence compter avec le temps. L’Europe s’et appuyée culturellement sur Rome et Athènes, puis sur le lent et laborieux travail des communautés monastiques qui ont intégré l’intelligence de l’Antiquité, sous le regard du Christ, et ont au sens propre et figuré, défriché les terres où nous vivons. Nous sommes à l’échelle des siècles.

Un organisme sain commence petit : c’est parce qu’il est petit, qu’il peut ensuite croître et capter et libérer cette énergie dont il a besoin. Un enfant doit naître petit, sinon c’est un monstre.

En d’autres termes, c’est à nous de relever le défi et de nous y mettre. « Nunc coepi » en latin, ce qui signifie, c’est maintenant que je commence et que je m’y mets ».

lundi 28 juin 2010

Finance islamique : que souhaitons-nous faire exactement ?

La finance islamique est devenue une nouvelle niche en Europe : Londres, Luxembourg, Dublin … revendiquent une expertise. Notre société en perte de spiritualité semble porter subitement son intérêt sur une philosophie financière religieuse. Est-ce vraiment cela dont il est question ?

Dans une Europe majoritairement suspicieuse, sinon inquiète par rapport à la mouvance islamique (l’exemple de la candidature de la Turquie à l’UE - alors qu’il s’agit pourtant d’un état laïque), je ne peux cacher mon étonnement pour cet engouement subit vis-à-vis de pratiques financières relevant de la chari’a, pourtant si décriée chez nous. Il est bien connu que l’argent n’a pas d’odeur (c’est vite dit …), ni de couleur ou encore – le présent constat est là – de religion.
Encore une fois, il ne me semble être question que de business et rien que de business. On va chercher l’argent où il se trouve, et dans la période actuelle – qui a vu disparaître une partie importante de la capacité d’investissement, du fait de la dépréciation des actifs – il y en a assurément toujours beaucoup dans les pays du Golfe.
D’un côté, la chari’a est condamnée dans nos sociétés au nom du port du voile ; de l’autre elle est louée au nom des nouvelles opportunités qu’elle offre pour les asset managers avides de capitaux frais.
Le contraste est saisissant et mérite d’être relevé. Le débat n’est pas de statuer sur le bien ou le mal du code de conduite religieux. Par définition, un code de conduite a une raison d’être. Il est censé poser des limites à l’agissement individuel et collectif, à instaurer des principes, voire une certaine morale qui sont nécessaires pour le bon fonctionnement d’une société. Il faudrait simplement apporter une cohérence dans nos politiques et nos pratiques économiques, car les comportements contradictoires rendent la situation ambigüe.

On ne pourra se passer d’un débat sur les valeurs, si l’on veut construire des concepts de développement durable et responsable dignes de ce nom. Car l’un des atouts de la finance islamique, c’est bien d’introduire dans la finance des valeurs. Il ne faudrait pas l’oublier.

mercredi 28 avril 2010

Chacun de nous ne demande qu’à en savoir plus …

Tea break ... - Hanoï, Vietnam - June '09






Lors de mon séjour au Vietnam, en décembre 2009, j’écrivais à ma femme, que je ne parvenais pas à m’habituer à l’intensité de mes voyages de suivi de projets. A chaque fois, c’est une « claque dans la figure » que je reçois, tant le décalage est grand entre nos « conversations de salon » dans le cadre de certaines réunions ici à Luxembourg … et la réalité du terrain. C’est très déstabilisant !! (au point d’avoir envie parfois de tout abandonner … réflexe naturel de repli)

Mon voyage de décembre dernier fut particulièrement difficile, car en l’espace d’une semaine sur place :
- j’ai fait du trekking dans les zones montagneuses du Nord-Vietnam, à la frontière laotienne, pour atteindre des communautés ethniques que j’assiste dans le cadre d’un projet de soutien communautaire impliquant des services financiers ( microfinance) et non-financier (formation et assistance technique).
- j’ai eu une réunion de travail chez Binhminh à Hanoï, MFI de bonne réputation au Vietnam et à l’étranger
- j’ai rencontré les instances officielles de la microfinance pour discuter d’un programme de formation
- enfin, j’ai me suis entretenu avec des experts indépendants … pour avoir justement un avis indépendant sur l’industrie de la microfinance en Asie.

Ce genre d’expérience bouscule nos pensées, nous fait parfois perdre pendant un instant tous nos repères (c’est l’effet « grand huit » des fêtes foraines) et remet sans cesse en cause les théories que nous lisons ou débattons sur notre continent.
Oui ! Il est nécessaire de communique et restituer ce feedback du terrain chez nous, ici, dans nos cercles et dans nos réunions de travail, à l’occasion d’évènements tels que des conférences, des « corporate events ».
J’accepte bien volontiers d’être speaker pour témoigner, expliquer par l’exemple, poser les bonnes questions. Cette option sera prise en considération en 2010.

A l’étude également, des voyages sur le terrain, par petits groupes (incluant visites de programmes, rencontres avec des professionnels et représentants locaux de la microfinance) à l’attention de banquiers, financiers, investisseurs luxembourgeois avertis, faisant preuve de curiosité.
Il faut définitivement faire un travail de découverte et de sensibilisation.

vendredi 19 mars 2010

Il faut sauver le SRI !

DOMINI Social Investments - US
Le SRI (socially responsible investment) a connu un développement sans précédent depuis 10 ans. De plus en plus de fonds d'investissement se prétendent SRI. L'évolution est similaire à celle de l'agriculture biologique : chacun peut aujourd'hui s'autodéclarer SRI. On entrevoit dès lors le risque d'abus.
La question se pose donc d'un labelling SRI. Mais attention, l'exercice est délicat : on ne pourra faire l'impasse sur une définition de la responsabilité en économie, si l'on veut un label vraiment crédible. Toute la question est là !


Le SRI aujourd’hui est menacé par sa banalisation. Pour information, +/- 90 % des 500 premières capitalisations (boursières) mondiales sont sélectionnées par les fonds SRI … ce qui laisserait croire que l’économie mondiale est donc socialement responsable ! Le SRI a tendance de plus en plus à se confondre avec l’investissement « mainstream », et à perdre en conséquence, sa particularité.

Un label SRI ne se justifie que s’il défend une particularité, par rapport à une situation générale. Si le SRI se généralise comme il a tendance à le devenir, alors il n’y a plus d’intérêt à le labelliser … sauf à redéfinir le concept SRI.

Une des raisons, à mon sens, pour laquelle le concept SRI s’est autant « démocratisé » au cours de ces 10 dernières années, est que la véritable question (philosophique) de la responsabilité – qui est pourtant le sous-jacent de la démarche SRI – a été écartée, ou plutôt rendue la moins contraignante possible. La porte a donc été ouverte à tous les acteurs ayant détecté l’opportunité d'un instant pour surfer sur une nouvelle vague, une nouvelle tendance.
Si l’on se réfère aux grands auteurs depuis la Grèce antique (tels Platon), jusqu’aux contemporains (tels Lévinas) en passant par Kant, on sait que la responsabilité engage des choix contraignants, difficilement compatibles avec une logique de maximisation du bien-être individuel, sur laquelle se base la théorie économique contemporaine dominante. Sans oublier les grandes religions, qui elles aussi ont fixé des limites au revenu du capital, justement pour prévenir une dérive malsaine et préjudiciable à la communauté.

Tout n’est pas noir, tout n’est pas blanc. Je défends l’approche « Best in class », car il faut privilégier à mon sens une dynamique de progrès, d’amélioration permanente. L’état de perfection n’existe pas, mais on peut certainement s’en approcher.
Une approche « Best in class » incluant un relèvement sérieux des critères d’évaluation me semble tout-à-fait pertinente. Savoir qu’aujourd’hui +/- 90 % des 500 premières capitalisations (boursières) mondiales sont sélectionnées par les fonds SRI ne me satisfait pas, car je n’ai pas l’impression que de réels progrès aient été réalisés sur le plan social et environnemental sur les 20 ou 30 dernières années (les droits sociaux et des travailleurs se sont certes améliorés, mais on voit aussi apparaître de nouveaux problèmes, liés au stress par exemple ; du côté environnemental, la déforestation reste toujours aussi frénétique, et les émissions de gaz à effet de serre n’ont pas ralenti, bien au contraire).

En conclusion, oui pour un label SRI, mais avec des critères d’exigence assez élevés, afin de séparer le vrai SRI du faux SRI. Il en va de la crédibilité du concept, de sa survie.
Pour définir le niveau d’exigence des critères, on ne pourra malheureusement pas échapper à la recherche d’une définition de la responsabilité en économie. Il y a déjà ici un gros travail pour trouver une définition acceptable par le plus grand nombre. Il y a – à n’en pas douter – une masse importante d’études universitaires sur le sujet.

Cette définition de la responsabilité est le socle, le fondement sur lequel on pourra commencer à définir les critères sociaux et environnementaux pertinents, et leur niveau d’exigence respectifs à atteindre pour prétendre être « SRI compliant »

mardi 12 janvier 2010

Le début de la fin des illusions ... ?

Le quotidien "Le Monde" publie aujourd'hui un article de Esther Duflo (professeure universitaire) intitulé : "Microcrédit, miracle ou désastre ?"

Cela fait plaisir de lire un article qui - pour une fois - pose vraiment les choses :
- tout le monde n'est pas entrepreneur dans l'âme, le crédit n'est donc pas la recette miracle ...
- le crédit solidaire a ses limites (l'individualisme gagne du terrain partout)
- les activités financées sont souvent de faible valeur ajoutée, donc peu créatrice de richesse

Il est temps de communiquer sur le fait que la microfinance n'est pas l'eldorado, tel qu'imaginé / rêvé / fantasmé par les financiers du Nord à la recherche de nouveaux produits financiers à la performance assurée.

Contrairement à ce que dit l'auteur, il existe depuis 4 ou 5 ans quelques travaux de recherche ayant abouti à la conclusion que la microfinance ne permet pas aux bénéficiaires de s'enrichir, ... mais seulement de stabiliser leur niveau de pauvreté. Dans l'euphorie de l'effet Yunus (et du prix Nobel), ces études sont restées dans l'ombre, n'ont pas été prises au sérieux, car jugées par trop pessimistes.

La microfinance n'est pas le produit adapté pour accompagner un véritable entrepreneur dans son projet d'entreprise. Il lui faudra rapidement un accompagnement financier sur mesure (du type des services d'une banque commerciale), que la microfinance ne sait pas fournir, car faisant appel à des compétences financières d'un autre niveau.

Enfin, l'auteur oublie de mentionner / d'insister sur l'autre volet de la microfinance - que les financiers du Nord ne veulent pas entendre, car cela induit des coûts (et obère donc la performance financière des MFIs) : l'accompagnement, la formation et l'assistance technique aux bénéficiaires. Qui aurait pu croire qu'en accordant un crédit à un pauvre, ne sachant parfois par lire, on en fait un entrepreneur réussi ? Même dans nos régions où l'accès à la formation est démocratisée, la réussite n'est pas automatique.

Tout cela pour dire que la microfinance n'est clairement pas le remède-miracle ... ni le produit financier-miracle pour les investisseurs en mal de placements alternatifs, en période de crise des marchés financiers.

Elle a tout simplement réussi, juste dans la mesure de ce qu'elle peut faire. Il reste donc à assurer la continuité au travers du système bancaire classique, sinon à inventer une autre forme de relais, d'étape suivante qui permettrait d'enclencher le cycle vertueux de la prospérité.